L’appel au secours

Combien grande fut la tristesse de Rûmî lorsque son Maître, Shams de Tabriz, disparut. Toute l’oeuvre que nous connaissons aujourd’hui est un hommage rendu à celui qui éveilla son coeur, à celui qui fit rayonner la splendeur de la Lumière divine et le rendit ivre d’Amour ! Dans l’ode de ce jour, No 854, Rûmî adresse un appel au secours à l’âme. Cet appel nous concerne tous, où que nous soyons, qui que nous soyons sans exception ! Nous sommes ici invités à une épreuve de foi !

J’ai dit : « Ne fais pas ainsi, ô mon âme ! Ce n’est pas ainsi qu’il faut agir.
Le chagrin veut s’emparer de notre vie ». Il répondit : « Ce n’est pas vrai.
Comment le chagrin aurait-il l’audace de s’attaquer à toi ?
Je le consumerai comme des brindilles, s’il ne prend pas garde.
Le chagrin éprouvera de la frayeur et de la crainte ; il nous connait bien.
Je le réduirai en cendres, bien qu’il ne soit pas de feu.
Le chagrin connaît son adversaire, et connaît aussi sa propre limite :
A l’égard de ceux qui sont obéissants, il est humble comme la terre.
Puisque tu nous appartiens, si tu pénètres dans le poison,
Comment le poison aurait-il l’audace de ne pas devenir miel ? »
Au sein de la fumée et des flammes, Abraham est joyeux.
Dieu seul connaît celui qui est ou non loyal.
Celui qui est loyal est le compagnon de l’Invisible.
Comment chaque espèce ne serait-elle pas le compagnon de son espèce ?
O toi dont la main est lumineuse comme celle du prophète Moïse,
Je désire que la main de Moïse ne reste pas cachée dans sa manche,
Car la rose de la félicité ne fleurit pas loin de ton visage.
« C’est Toi seul que nous adorons », ô mon âme ! n’existe pas sans notre appel au secours.

Podcast et intermède musical: L’appel au secours

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O toi, Visage de l’Amour éternel

Cet Ode de Rûmî, est un appel, un rappel … un hommage rendu …
A travers les épreuves plus ou moins douloureuses de ce monde, il nous invite à retrouver le chemin de l’Union divine, à ne pas rester prisonnier des émotions, des désillusions, des tourments imposés dans ce monde-ci. Il nous rappelle que quelles que soient les expériences, l’âme, bien que prisonnière de ce corps, n’est pas séparée de la plénitude du TOUT.

O toi dont la chaleur cachée derrière les voiles est pour nous l’été !
O toi collyre de l’oeil de l’âme, où donc es-tu parti ? Reviens,
Afin que l’eau de la miséricorde jaillisse du sein des flammes,
Que la verdure surgisse des terres arides, que les tombes deviennent des jardins,
Afin que le raisin soit mûr et que notre pain soit cuit.
O Soleil de l’âme et du coeur ! O toi par qui le soleil est humilié !
Regarde enfin comment ont emprisonné notre âme cette eau et cette argile.
Maintes fois les épines sont devenues roseraies, par amour de ton visage,
Jusqu’à ce que cent mille aveux aient jailli de notre foi.
O toi, Visage de l’Amour éternel ! Tu es apparu dans la beauté d’un corps
Afin de guider l’âme, hors de cette prison, vers l’Unique …
Dans le sombre chagrin, fais apparaître la joie, de cette nuit profonde fais sortir le jour,
Un jour étrange, plein de merveilles, ô notre aurore qui répands la lumière !
D’une perle de pacotille tu fais une perle d’un pur orient, tu rends jalouse Zohra elle-même.
Tu transformes le pauvre hère en monarque. Longue vie à toi, ô notre sultan !
Où sont les yeux capables de te voir, afin de parvenir à ta poussière ?
Où est l’oreille intelligente capable d’entendre nos discours ?
Quand le coeur compte les bienfaits, rendant grâces de ces douceurs,
De chaque atome de notre corps, le désir s’écrie.
Le son du tambourin s’est élevé de l’âme, afin que les parcelles se joignent au tout,
Fleur à fleur, rose à rose, hors de notre prison d’épines.

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La parole de l’Unité

Une fois encore, Rûmî nous rappelle que tout est UN. Que rien n’est séparé de Lui, Dieu.
Que tout provient de Lui et que tout retournera à Lui, l’heure venue. Il nous rappelle que sous les traits de la multiplicité, se cache l’Unique ! Savons-nous seulement reconnaître la parole de l’Unité dans notre quotidien ? Dans ce qui nous semble être des expériences multiples et différentes ? Sommes-nous seulement conscients que le silence vaut mieux que de vaines paroles dépourvues d’Amour et responsables de tant de difficultés ?
Voici ce que nous dit l’ode No 639

Cet ami à la tunique rouge qui vint l’an dernier, éclatant comme la lune,
Cette année-ci est venu revêtu d’un froc gris.
Ce Turc que tu avais vu alors se livrer au pillage,
C’est le même qui est venu cette année, sous les traits d’un Arabe.
L’ami est le même, bien que son vêtement ait changé :
Il a ôté son autre vêtement, et puis il est revenu.
Ce vin est le même, bien que le flacon soit nouveau :
Vois comme il est venu apporter le plaisir à ceux qui sont ivres !
O hommes ! vous pensiez que ces flambeaux étaient morts :
Ce flambeau est sorti de la demeure du secret.
Ce que je dis, ce n’est pas la métempsychose, c’est la parole de l’Unité pure,
Venue du bouillonnement des vagues de l’océan profond.
Une goutte fut séparée de cet océan inséparable.
Car Adam fut créé d’argile de poterie.
Le Byzantin s’est caché le visage quand est venu le temps des Abyssins ;
Il est revenu aujourd’hui au sein de cette puissante armée.
Si le soleil se voile au crépuscule, il n’est pas anéanti.
Cette lune éclatante est apparue dans une des maisons du Zodiaque.
Renonce aux paroles, contemple le miroir de la réalité,
Car hésitations et difficultés proviennent des paroles.

Podcast : La parole de l’Unité

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Sauve ton serviteur du naufrage du désespoir

 

Dans l’ode No 99 Rûmî implore le Bien-Aimé, Lui, le créateur de toute chose, de toute vie, en tout lieu, de poser son regard bienveillant sur les créatures.
La douleur de la séparation après la mort de Shams de Tabriz, fut telle, qu’il s’est laissé consumé par l’Amour infini du Bien-Aimé.
Sauve ton serviteur du naufrage du désespoir implore-t-il, sors de ta cachette.
Cet ode, tout entier, est une louange à l’Amour infini de Dieu en toute circonstance.
A chacun de le vivre au plus profond de son âme ! A chacun de célébrer la beauté de Son Amour en tout geste, en toute parole, en tout lieu, en toute vérité et en toute simplicité !

Le bien-aimé s’est caché à cause des querelles :
Tous sont partis, tout est désert. Sors de ta cachette.
Sauve ton serviteur du naufrage du désespoir,
Donne la joie à mon visage pâli par le souci.
J’ai transformé mon être en océan de larmes :
Pourquoi ne viens-tu pas contempler l’océan ?
Puisque tu as vu dans le miroir ton propre visage,
Où trouver une vision plus noble que celle-là?
Je me trompe : le miroir ne te contient pas,
Par ta lumière, toutes choses s’anéantissent.
Ce miroir n’a plus besoin de subir de polissage :
C’est par ton visage qu’il devient limpide et pur.
Tu es caché comme l’intelligence, et tout vient de toi,
Les ruines comme les édifices, et cela en tout lieu.
Quiconque demeure dans ta proximité,
Devant lui s’abaisse la terrasse des Pléiades.
Quel est l’état du corps, quand il est séparé de l’âme ?
Quelle excuse aurait celui qui devant toi peut rester indifférent ?
Quel secours trouverait-il chez ses amis intimes
Celui qui est resté esseulé loin de l’âme pleine de douceur ?
Tu es plus suave que le matin, pour les créatures, chaque jour.
Tu es plus délicieux que le sommeil pour ceux qui sont las, le soir.
Je t’ai vu dans mon âme, et je me suis senti délivré.
Je ne parle pas, comme les égarés, des raisons contingentes.
Puisque tu as mis le feu de l’amour dans l’univers,
Le monde est devenu tout rempli de suavité.
La lune et le soleil tirent de toi leur beauté,
L’étoile polaire et les Gémeaux tirent de toi leur être.
Si la nuit est devenue la guérison et le repos des créatures,
C’est parce que ton amour lui a donné cette quiétude des ténèbres.
Les créatures sont pareilles au phalène, le jour est comme la chandelle :
Tu l’as rendu beau par ta propre beauté.
Pour chaque phalène qui a vu ta flamme,
La nuit est devenue plus éclatante que l’aurore.
Il vole autour de la flamme de ta beauté
Jour et nuit, et n’éprouve nulle crainte.

Podcast et intermède musical: Sauve ton serviteur du naufrage du désespoir

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La mort physique et la mort mystique

La mort physique et la mort mystique est le sujet des quatrains que j’ai choisi de vous partager aujourd’hui. C’est avec subtilité et délicatesse que Rûmî nous enseigne l’art de la mort mystique, sujet majeur de toute son oeuvre. Mourir avant de mourir pour comprendre le sens de la Vie. Il a lui-même appris de son Maître, Shams de Tabriz, l’importance de ce processus. Mourir à soi-même est l’acte le plus difficile à l’homme, et pourtant ce n’est qu’en passant par cette étape qu’il parviendra à la vie éternelle.

Tant que demeure en toi quelque chose de ton existence
Ne sois pas en repos, car l’idolâtrie demeure
Supposons que tu aies brisé les idoles de ton esprit :
Cette idole dont tu as cru ton esprit libéré pourtant demeure.

Ecoute, s’il t’est possible d’écouter :
Arriver à Lui, c’est se quitter soi-même.
Silence : là-bas, c’est le monde de la vision
Pour eux, la parole n’est que regard.

O toi qui est rendu vivant par l’âme de ce monde
Honte à toi, pourquoi es-tu vivant de la sorte ?
Ne sois pas sans amour, afin de ne pas être mort
Meurs dans l’amour, pour demeurer vivant.

Si tu obéis à tes passions et tes désirs,
Sache-le, tu mourras misérable
Si tu renonces à tout cela, tu verras clairement
Pourquoi tu es venu, et où tu t’en vas.

Podcast et intermède musical: La mort physique et la mort mystique

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