Qu’il en soit ainsi

La rencontre de Shams de Tabriz a bouleversé la vie de Rûmî; il nous le confie à travers toute son oeuvre ! Aujourd’hui, à travers l’ode mystique No 82, il nous partage le cheminement qui s’est opéré dans son coeur au contact de Shams. Puissent nos coeurs entendre les appels aux changements impératifs à adopter pour rencontrer enfin la Beauté de l’Ami, du Bien-Aimé. Qu’il en soit ainsi !

Le Bien-Aimé répond à présent à nos voeux : qu’il en soit ainsi.
Son impiété est devenue foi parfaite : qu’il en soit ainsi !
Si le royaume fut troublé, c’est par Satan le pervers ;
Salomon a reconquis son empire : qu’il en soit ainsi.
L’ami qui blessait mon coeur, qui me fermait sa porte
Est devenu compatissant pour ses amis : qu’il en soit ainsi.
Il buvait seul le vin, il s’amusait seul ;
Il est prêt à sacrifier sa vie à son hôte, à présent : qu’il en soit ainsi.
Par sa feinte colère, par ses douces manières,
Le monde est comme un champ de cannes à sucre ; qu’il en soit ainsi.
La nuit s’est enfuie, le jour est arrivé, le chagrin est parti, la fortune est venue,
Le soleil est devenu éclatant : qu’il en soit ainsi.
Grâce aux coeurs affligés, aux efforts des fous de Dieu,
Cette chaîne s’est relâchée : qu’il en soit ainsi !
La fête est venue, la fête est venue, l’ami que nous effarouchions est venu.
Les étrennes sont venues en abondance : qu’il en soit ainsi.
O chanteur mystique, ne te cantonne pas « en bas »,
Car Vénus est entrée dans le signe de la Balance : qu’il en soit ainsi !
Le derviche est devenu Faridûn, il est devenu l’associé de Qârûn
Il est devenu le commensal du Roi : qu’il en soit ainsi.
Vois le vent qui, par la magie des lèvres de Shîrîn
Gémit avec la flûte de roseau : qu’il en soit ainsi.
Pharaon, avec toute sa dureté, avec toute son infortune,
Est devenu à présent Moïse fils de ‘Imrân. Qu’il en soit ainsi !
Ce loup d’une telle laideur, rempli d’ignorance et d’oubli,
Est devenu à présent Joseph de Chanaan. Qu’il en soit ainsi !
O Shams, Soleil de Dieu de Tabriz ! Dans la mesure où tu apparais
Tabriz est devenu l’Orient. Qu’il en soit ainsi !

Podcast et intermède musical: Qu’il en soit ainsi

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Chacun de nos états est un aliment

Aujourd’hui l’ode de Rûmî No 691 nous interroge et nous interpelle.
Il nous invite à prendre conscience de nos états d’âme, de ce que nous disons effectivement à travers eux.
Il nous rend attentifs sur le fait que chacun de nos états est un aliment pour une catégorie de gens.
Dès lors nous pouvons choisir et nous interroger sur : quels (états) aliments nous offrons et à quelle catégorie de gens et desquels nous nous nourrissons.
Autrement dit : Que sommes-nous prêts à vivre aujourd’hui : la recherche d’union avec Dieu ou le désespoir et le conflit ?

Bien que les rossignols aient les meilleurs chants,
Les autres oiseaux ne restent pas silencieux.
Il est vrai qu’ils sont dépourvus d’attraits ;
Cependant, ne glanent-ils pas les graines de la pauvreté ?
Nous-mêmes ne sommes pas moins que des anneaux,
Bien que ces rois soient les joyaux qui les ornent.
Si l’on ne désire pas entendre mes plaintes
Pour quelle raison m’a-t-on donc créé ?
Le doux et l’acide sont tous deux au goût du roi,
C’est pourquoi furent placées ici-bas deux marmites.
Il faut que des mets amers existent aussi à la cuisine,
Car ils plaisent à ceux qui sont ivres.
Chacun de nos états est l’aliment d’une catégorie de gens :
C’est par cette nourriture que sont fortifiés les êtres invisibles.
Les oiseaux de l’âme qui arrivent du ciel
Ne restent sur terre que deux ou trois jours seulement.
S’ils sont envoyés du ciel,
Bien qu’ils soient les astres de la foi,
C’est pour qu’ils connaissent tout le prix de l’union avec Dieu,
Qu’ils comprennent quelle est la douleur d’être séparé de Dieu.
Si l’on verse sur la poussière de la poudre d’or,
On la recueille, on ne l’y laisse pas.
Shams de Tabriz était un homme de peu de paroles :
Les véritables mystiques sont patients et sincères.

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Loin de vous

Dans l’ode mystique No 138, Rûmî nous relate la souffrance de la séparation d’avec le Bien-Aimé. Il nous dit aussi combien il serait douloureux de pouvoir vivre sereinement loin de LUI, notre Bien-Aimé. Les rameaux du jardin de la joie, nous dit-il, qui sont vivaces et verdoyants, qu’ils soient desséchés, loin de vous !

Que notre visage ne soit que pâleur, loin de vous ;
Qu’au fond de la mer du coeur ne se trouve pas de perle, loin de vous !
Les rameaux du jardin de la joie, qui sont vivaces et verdoyants,
Qu’ils soient desséchés, loin de vous, et qu’ils se fanent, loin de vous.
Ce phénix du coeur, habitué à vivre dans votre ombre,
Qu’il ne soit pas dans les flammes du feu, loin de vous.
J’ai vu l’âme souffrante et lui ai dit : « Es-tu heureuse ?
Ah ! dis-moi pourquoi n’y a-t-il pas de fruits ? Que les fruits ne mûrissent pas
loin de vous ! »
L’âme a détourné de moi son visage, elle a contemplé sa propre image,
Elle a dit : »Que ma dure peine ne soit pas adoucie loin de vous ! »
Puisque vous-même, et tous les êtres, sont comme ces figures sculptées
par Âzar,
Qu’Âzar lui-même et ce qu’il crée ne restent pas loin de vous.
Nous donnons à boire au coeur, gorgée par gorgée, avec la coupe pleine de feu ;
Que ce coeur ne boive pas le sorbet du Kawthar loin de vous.
Cent mille âmes se sont sacrifiées pour le vin du jour prééternel.
L’intelligence dit : »Que ce vin ne m’enivre pas, loin de vous ! »
Les deux villages, c’est-à-dire, les deux existences d’ici-bas et d’au-delà, ont été magnifiés par ton parfum :
Que dans ces deux villages, cet humble serviteur ne soit pas maître, loin de vous.
L’oeil de l’observateur est rempli de lumière parce qu’il t’a vu ;
Que ces deux yeux ne soient pas inondés de lumière loin de vous.
Et si, lorsque nous sommes loin de vous, chacun de nos cheveux devenaient un Sandjar ou un Khosraw,
Que Khosraw, roi des rois, ou Sandjar, n’existent pas loin de vous.
Tant que la séparation d’avec Shams de Tabrîz nous blesse comme le sabre,
Que les bouquets de fleurs soient pareils à des sabres, loin de vous.

Podcast et intermède musical: Loin de vous

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Quand ton oeil s’ouvrira tu seras voyant

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Quand ton oeil s’ouvrira tu seras voyant

L’ode No 74 que nous livre Rûmî est une pure merveille ! Il nous invite au dépouillement, au renoncement des richesses matérielles pour vivre l’expérience des richesses mystiques !  Il nous livre un secret, pourtant déposé au coeur du coeur de chaque homme, et méconnu par le plus grand nombre ! Shams de Tabriz, s’adresse au bourgeon du coeur en ces termes : « Quand ton oeil s’ouvrira, tu seras voyant avec nous ».
Puisse le coeur de chacun entendre ce secret !

Si tu n’es pas chercheur, tu chercheras avec nous.
Si tu n’es pas ménestrel, tu chanteras avec nous.
Si tu es Qârûn, dans l’amour tu deviendras misérable.
Si tu es Seigneur, tu deviendras esclave.
Un seul flambeau de cette assemblée allume cent flambeaux.
Si tu es mort ou vivant, tu ressusciteras avec nous.
Tes pieds seront libérés d’entraves, tout brillera à tes yeux
Afin que tout ton être soit épanoui comme la rose, avec nous.
Revêts un instant de pauvres habits, pour voir les gens au coeur vivant :
Rejette la soie, et vêts-toi de bure, avec nous.
Quand la graine est semée, elle pousse et devient un arbre.
Si tu comprends ce secret, tu seras abaissé avec nous.
Shams-ul-Haqq de Tabriz dit au bourgeon du coeur :
« Quand ton oeil s’ouvrira, tu seras voyant avec nous ».

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