Suis les traces du coeur

Avec cet ode No 898 Rûmî nous invite à suivre les traces du coeur pour découvrir les vérités cachées. Il nous invite au silence, nous parle de la nature cachée du coeur, nous invite à découvrir ses secrets en ces mots : « Suis les traces du coeur, afin de découvrir ce qui est caché ».  Saurons-nous suivre ces signes ?

J’ai crié : « Le coeur enivré, où s’en va-t-il » ?
Le Roi des rois répondit : « Silence. Il vient vers nous »-
J’ai dit : « Tu es uni à moi. C’est en moi-même que tu parles.
Alors, pourquoi mon coeur s’en va t-il au loin en vain » ?
Il dit : « Le coeur nous appartient. Il est notre Chevalier.
Il s’en va combattre toutes les fausses pensées.
Partout où il s’en va, la félicité l’accompagne.
Ne dis rien. Laisse-le s’en aller où il veut.
Parfois, pareil au soleil, il devient un trésor pour la terre.
Parfois, comme la prière du Prophète, il monte vers le ciel.
Parfois, il déverse le lait de la générosité par le sein du nuage.
Parfois, il se promène dans la roseraie de l’âme, tel la brise matinale.
Suis les traces du coeur, afin de découvrir ce qui est caché :
La verdure et la rose poussent, le fleuve de la fidélité coule ».
Celui qui octroie au monde la forme est pur et sans forme.
Celui qui créé toutes les apparences est lui-même sans apparence.
Il est la perfection des perfections, bien qu’il semble commettre des fautes ;
Il est la fidélité des fidélités, bien qu’il exerce une tyrannie.
Le coeur est comme une ouverture, la maison est illuminée par lui.
Le corps va vers l’anéantissement, le coeur va vers la pérennité.
Le coeur a causé des troubles, il a versé le sang des rois.
Il s’est mêlé à tout, bien qu’il soit séparé.
Celui qui a créé la magie divine, apparente dans le coeur de chacun,
Il a dépouillé les Gémeaux, il s’insinue comme Sohâ,
O mon coeur, c’est une sottise que de prendre garde à sa bourse :
La fortune s’est envolée, et la vie s’en va suivre le larron.
J’ai dit : »Tu es un magicien ». Il rit légèrement, et dit :
« Comment la magie opèrerait-elle en présence de la mémoration de Dieu » ?
Je dis, : « C’est vrai. Mais ta magie est le mystère de Dieu.
Ton heureuse magie accompagne l’ordre du destin ».
L’amant a toujours des aventures de coeur et d’âme :
Il est dépouillé de tout. Voici qu’il marche devant toi.

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Chacun de nos états est un aliment

Aujourd’hui l’ode de Rûmî No 691 nous interroge et nous interpelle.
Il nous invite à prendre conscience de nos états d’âme, de ce que nous disons effectivement à travers eux.
Il nous rend attentifs sur le fait que chacun de nos états est un aliment pour une catégorie de gens.
Dès lors nous pouvons choisir et nous interroger sur : quels (états) aliments nous offrons et à quelle catégorie de gens et desquels nous nous nourrissons.
Autrement dit : Que sommes-nous prêts à vivre aujourd’hui : la recherche d’union avec Dieu ou le désespoir et le conflit ?

Bien que les rossignols aient les meilleurs chants,
Les autres oiseaux ne restent pas silencieux.
Il est vrai qu’ils sont dépourvus d’attraits ;
Cependant, ne glanent-ils pas les graines de la pauvreté ?
Nous-mêmes ne sommes pas moins que des anneaux,
Bien que ces rois soient les joyaux qui les ornent.
Si l’on ne désire pas entendre mes plaintes
Pour quelle raison m’a-t-on donc créé ?
Le doux et l’acide sont tous deux au goût du roi,
C’est pourquoi furent placées ici-bas deux marmites.
Il faut que des mets amers existent aussi à la cuisine,
Car ils plaisent à ceux qui sont ivres.
Chacun de nos états est l’aliment d’une catégorie de gens :
C’est par cette nourriture que sont fortifiés les êtres invisibles.
Les oiseaux de l’âme qui arrivent du ciel
Ne restent sur terre que deux ou trois jours seulement.
S’ils sont envoyés du ciel,
Bien qu’ils soient les astres de la foi,
C’est pour qu’ils connaissent tout le prix de l’union avec Dieu,
Qu’ils comprennent quelle est la douleur d’être séparé de Dieu.
Si l’on verse sur la poussière de la poudre d’or,
On la recueille, on ne l’y laisse pas.
Shams de Tabriz était un homme de peu de paroles :
Les véritables mystiques sont patients et sincères.

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Quelle est la Voie

Alors que partout le déconfinement se met en place avec une certaine prudence, certes, mais progresse, espérant la reprise des affaires, du tourisme, des rencontres, une question traverse mon esprit : Pourquoi tant de frénésie à vouloir retourner à ce qui était avant ?
Quelle est la Voie qui nous invite aujourd’hui après ces mois de « mise en pause » du système économique ?
La réponse que je vous propose est celle contenue dans l’ode No 374 de Rûmî qui mérite méditation.

Quelqu’un demanda : »Quelle est la Voie ? »
Je dis : « La Voie, c’est renoncer aux désirs ».
O toi, amoureux de Dieu ! Sache que ta voie
Consiste dans la recherche du consentement de  ce Maître.
Puisque tu recherches le désir et la volonté de l’Ami,
La recherche de ton propre désir est pour toi illicite.
L’âme est devenue tout entière amour de l’Aimé,
Cet amour est un monastère sublime.
L’amour pour Lui n’est pas plus aisé à atteindre que la cime des monts.
Le faîte de la montagne, pour nous, c’est l’accomplissement.
La grotte où se cache l’Ami, c’est l’Amour.
L’harmonie de l’âme est l’oeuvre de Sa beauté ;
Toutes les choses que te donne la pureté sont licites.
Il ne m’appartient pas de te préciser lesquelles :
Garde le silence et suis le Maître (le Pîr) de l’amour :
Lui seul est ton guide dans ce monde et dans l’autre.

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Les amoureux

C’est l’ode No 972 que j’ai choisi de vous partager aujourd’hui, parce qu’il parle de la mort en apparence… Rûmî nous relate ici la manière dont les amoureux meurent à cette vie pour naître à la Réalité du Bien-Aimé. Les amoureux meurent avec la pleine conscience de mourir* nous dit-il, comme il nous dit aussi : « Les amoureux ouvrent les yeux qui voient l’invisible »
Il nous interpelle indirectement à travers cet ode : « Et vous, êtes-vous un amoureux ? Vous envolerez-vous vers le firmament ou mourrez-vous aveugle et sourd ? »
Il n’est jamais trop tard pour s’interroger sur le lien que l’on désire entretenir avec le Bien-Aimé.
Voici cet Ode

Les amoureux meurent avec la pleine conscience de mourir,
Mais c’est devant un Bien-Aimé plein de douceur qu’ils meurent.
Ils ont bu, au jour prééternel, l’Eau de la Vie ;
Il est inéluctable qu’ils meurent d’une autre manière.
Puisqu’ils font partie de la cohorte des amants,
Ils ne quittent pas la vie comme les gens ordinaires.
Ils surpassent la dignité des anges par la grâce,
Puisse-t-il ne pas leur arriver de mourir comme des humains !
Crois-tu donc que les lions meurent comme des chiens hors de la maison ?
Le Roi de l’âme court à leur rencontre,
Quand les amoureux meurent pendant le voyage.
Tous rayonnent comme le soleil s’ils meurent aux pieds de cette lune.
Les amoureux qui sont l’âme l’un de l’autre
Meurent tous par amour l’un de l’autre.
L’amour rafraichit leur coeur embrasé,
Et pourtant ils meurent de la brûlure de ce coeur.
Tous sont pareils à la perle solitaire ;
Ils meurent comme des orphelins, sans leur père et sans leur mère.
C’est vers le firmament que s’envolent les amoureux,
Les négateurs meurent dans les profondeurs de l’enfer.
Les amoureux ouvrent les yeux qui voient l’invisible,
Mais les autres hommes meurent aveugles et sourds.
Ceux qui ne dormaient pas, la nuit, par crainte de Dieu,
Meurent tous sans danger et sans crainte.
Ceux qui ici-bas adoraient de l’herbe,
Semblables à des vaches, meurent comme des animaux.
Ceux qui aujourd’hui cherchent ce Regard
Meurent sous ce Regard plein de joie et de rires.
Le Roi les place du côté de la grâce ;
Ils ne meurent pas humbles et méprisés.
Ceux qui cherchent à acquérir les qualités du Prophète
Meurent pareils à Abû-Bakr et à ‘Omar.
Puissent-ils être loin de l’anéantissement de la mort !
Mais si je dis qu’ils meurent, ce n’est qu’une forme de langage.

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Comment la créature saurait-elle ce dont elle est capable

Comment la créature saurait-elle ce dont elle est capable si elle n’était pas mise à l’épreuve ? Nous en faisons tous l’expérience en ce moment. La crise sanitaire qui touche tous les continents, tous les peuples, invite chacun à se remettre en question, chacun à méditer sur son mode de fonctionnement, ses croyances, ses priorités, ses peurs, ses valeurs….Seule une mise à l’épreuve si profonde peut révéler à l’être ce dont il est capable.
Pour alimenter votre méditation, voici quelques quatrains tirés du Rûbâi’yât de Rûmî

Sans moi, des paroles sortent de mes lèvres.
Je suis sans nouvelles de celui qui parle :
Le poison et le sucre sont ce que je désre :
Comment la créature saurait-elle ce dont elle est cap
able ?

Il faut avoir un état particulier au tréfonds de l’âme
Ecouter des histoires ne suffit pas à résoudre ce problème
Un ruisseau d’eau à l’intérieur de la maison,
Vaut mieux que le fleuve qui coule au-dehors.

O mon bien-aimé, par Dieu, tu es l’âme de mon âme
Quand te parviendra mon message, tu le liras.
Ne le déchire pas d’étonnement
Car tu connais l’état de mon coeur bouleversé.

O toi qui as échangé contre du pain la perle de ta foi,
Toi qui as donné une mine d’or contre une graine sans valeur,
Comme Nemrod n’a pas offert son coeur à Abraham
Finalement il a dû sacrifier sa vie à un moucheron.

Si tu lis une seule page de notre livre,
Tu deviendras émerveillé : et quel émerveillement !
Si tu assistes un seul instant à la leçon du coeur,
Tu peux attirer les maîtres vers ton propre enseignement.

Podcast et intermède musical: Comment la créature saurait-elle ce dont elle est capable

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