Quand les yeux deviendront voyants

Avec l’ode No 596 Rûmî nous fait une confidence quant à la Beauté de l’âme. Il nous révèle que tant que nous ne nous annihilons pas totalement en Dieu, Il ne nous dévoile pas son visage. Quand les yeux deviendront voyants, dit-il, le coeur ira vers la rectitude.
A l’ombre de Son ombre, goûte la félicité qu’Il dispense.

Une fois encore, nous avons une merveille à méditer et à découvrir.

Cette beauté que son éclat même dérobe aux yeux
Rend l’âme féconde par le goût de son amour.
La raison, par nostalgie de son parfum, de la lumière de son visage,
Rit, émerveillée, et pourtant se mord les mains.
A chaque aube, son passage me remplit d’une stupeur éperdue.
Avant que l’âme ne devienne ainsi, Il ne dévoile pas son visage.
Toute chose que tu aperçois, tu la vois sans en prendre conscience ;
Tant que tu es conscient, en vérité, Il ne se montre pas,
Tu ne participe pas à son souffle, et l’âme n’est pas son amie intime.
Une pensée consciente, elle non plus, n’est pas digne.
Le corps a tissé un voile, l’âme l’a emporté et brûlé,
Car avec ces deux adversaires le coeur ne peut approcher de l’amour.
Tant que deux armées étrangères se trouvent dans cette demeure,
La lutte et le combat ne donnent naissance qu’à la poussière.
Veux-tu sauver ta vie ? Enfuis-toi auprès du sultan.
Si tu bénéficie de l’antidote, le poison ne t’atteindra pas.
A l’ombre de son ombre, goûte la félicité qu’il dispense,
Afin que l’âme remplie de miséricorde se repose jusqu’à la Résurrection.
Quand les yeux deviendront voyants, grâce à ce Roi, Salâh-ud-Dîn,
Le coeur ira vers la rectitude, l’âme se procurera un flambeau.

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Insuffle dans nos oreilles le souffle divin

Avec l’ode No 11, Rûmî attire notre attention sur le fait que quelles que soient les épreuves auxquelles l’homme doit faire face, quelle que soit l’époque, il est invité, à chaque fois, à se rappeler qu’il est intimement uni au Bien-Aimé. « …rend vivant cet être d’eau et d’argile  » dit-il,  « Insuffle dans nos oreilles le souffle divin ».
Puissent les coeurs endurcis par les épreuves entendre le souffle divin et se réveiller à Sa présence.

O oiseau dont la voix ressuscite les morts, ô rossignol aux doux chants,
Ravis Zohra par cette mélodie qui redonne la vie.
Montre ta beauté, afin qu’amis et ennemis
Apportent le témoignage de leurs visages pâlis, de leurs yeux pleins de larmes.
Le chagrin fait gémir tous les hommes et les femmes :
« Sauve-nous de la peine qu’inflige ce tyran pareil au dragon ! »
Tu as fait résonner, de toute sa puissance, le luth du chagrin
Avec les sons graves ou aigus de tes paroles : « Eloigne-toi » .
Pour que, grâce à ton équité, le néant donne naissance à des chants passionnés, ô toi aux purs accents,
O échanson !  Souviens-toi de nous ! Remplis cent outres de ton souffle,
Rends les âmes pleines d’amour comme Farhâd, éprises de cette Face belle comme Shirîn.
Puisque tu es le Séraphiel du coeur, rend vivant ces êtres d’eau et d’argile ;
Par bonté, insuffle dans nos oreilles le souffle divin.
Nous sommes pareils à une meule dressée, où le blé se mêle à la paille ;
Par le souffle vivifiant du vent, sépare des fétus le grain,
Afin que le chagrin aille au chagrin, et la joie à la joie,
Afin que la boue aille à la boue, et que le coeur monte au ciel.
Ces grains précieux, demeurés prisonniers du sol,
Attendent la pluie favorable, ils désirent la brise matinale,
Pour que le sort de l’âme soit précieux comme l’or, qu’elle soit unie au Bien-Aimé.
D’inférieure, elle deviendra élevée, de paille elle deviendra ambre.
Garde le silence. Il m’a été permis de dire
Un secret que nul jusqu’à moi n’a murmuré à l’oreille des Frères de pureté.

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Qu’il en soit ainsi

La rencontre de Shams de Tabriz a bouleversé la vie de Rûmî; il nous le confie à travers toute son oeuvre ! Aujourd’hui, à travers l’ode mystique No 82, il nous partage le cheminement qui s’est opéré dans son coeur au contact de Shams. Puissent nos coeurs entendre les appels aux changements impératifs à adopter pour rencontrer enfin la Beauté de l’Ami, du Bien-Aimé. Qu’il en soit ainsi !

Le Bien-Aimé répond à présent à nos voeux : qu’il en soit ainsi.
Son impiété est devenue foi parfaite : qu’il en soit ainsi !
Si le royaume fut troublé, c’est par Satan le pervers ;
Salomon a reconquis son empire : qu’il en soit ainsi.
L’ami qui blessait mon coeur, qui me fermait sa porte
Est devenu compatissant pour ses amis : qu’il en soit ainsi.
Il buvait seul le vin, il s’amusait seul ;
Il est prêt à sacrifier sa vie à son hôte, à présent : qu’il en soit ainsi.
Par sa feinte colère, par ses douces manières,
Le monde est comme un champ de cannes à sucre ; qu’il en soit ainsi.
La nuit s’est enfuie, le jour est arrivé, le chagrin est parti, la fortune est venue,
Le soleil est devenu éclatant : qu’il en soit ainsi.
Grâce aux coeurs affligés, aux efforts des fous de Dieu,
Cette chaîne s’est relâchée : qu’il en soit ainsi !
La fête est venue, la fête est venue, l’ami que nous effarouchions est venu.
Les étrennes sont venues en abondance : qu’il en soit ainsi.
O chanteur mystique, ne te cantonne pas « en bas »,
Car Vénus est entrée dans le signe de la Balance : qu’il en soit ainsi !
Le derviche est devenu Faridûn, il est devenu l’associé de Qârûn
Il est devenu le commensal du Roi : qu’il en soit ainsi.
Vois le vent qui, par la magie des lèvres de Shîrîn
Gémit avec la flûte de roseau : qu’il en soit ainsi.
Pharaon, avec toute sa dureté, avec toute son infortune,
Est devenu à présent Moïse fils de ‘Imrân. Qu’il en soit ainsi !
Ce loup d’une telle laideur, rempli d’ignorance et d’oubli,
Est devenu à présent Joseph de Chanaan. Qu’il en soit ainsi !
O Shams, Soleil de Dieu de Tabriz ! Dans la mesure où tu apparais
Tabriz est devenu l’Orient. Qu’il en soit ainsi !

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Le coeur est un jardin secret

A travers ces quelques Quatrains, nous sommes invités à pénétrer dans les méandres du coeur et y découvrir ses mystères. Le coeur est un jardin secret où se cachent des arbres, nous dit Rûmî, il manifeste cent formes, mais il n’a qu’une seule forme.
Le coeur est pareil à l’eau pure et limpide, osons regarder s’y refléter la lune !

O brise du matin, apporte-nous un message :
As-tu vu dans le chemin ce coeur plein de feu,
As-tu vu ce coeur embrasé et rempli de passion
Qui a incendié cent rochers de sa flamme ?

O mon âme, il est un passage entre ton coeur et le mien,
Ayant trouvé la porte, mon coeur connaît l’éveil.
Mon coeur est pareil à l’eau pure et limpide :
Dans le miroir de l’eau claire se reflète la lune.

On me dit : « Le coeur nourrit une autre passion
Il s’est éloigné de nous, il désire un autre lieu. »
Quand il est revenu, s’excusant, je l’enmtendis murmurer
Qu’il préparait pour moi, là-bas, une autre nourriture.

Le coeur est un jardin secret où se cachent des arbres
Il manifeste cent formes, mais il n’a qu’une seule forme.
C’est un océan immense, sans limite et sans rives
Cent vagues s’y brisent : Les vagues de chaque âme.

Parler de toi me rend silencieux
La douceur de tes actes me rend inactif
J’ai couru de ta cage à la demeure du coeur
Le coeur est devenu cage, et m’a rendu ton captif.

La fumée de notre coeur est le signe de notre passion, ô mon coeur !
Cette fumée qui émane du coeur est visible,
Chaque vague qui passe dans le coeur est du sang
Ce n’est pas un coeur, serait-ce un océan, ô mon coeur ?

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Suis les traces du coeur

Avec cet ode No 898 Rûmî nous invite à suivre les traces du coeur pour découvrir les vérités cachées. Il nous invite au silence, nous parle de la nature cachée du coeur, nous invite à découvrir ses secrets en ces mots : « Suis les traces du coeur, afin de découvrir ce qui est caché ».  Saurons-nous suivre ces signes ?

J’ai crié : « Le coeur enivré, où s’en va-t-il » ?
Le Roi des rois répondit : « Silence. Il vient vers nous »-
J’ai dit : « Tu es uni à moi. C’est en moi-même que tu parles.
Alors, pourquoi mon coeur s’en va t-il au loin en vain » ?
Il dit : « Le coeur nous appartient. Il est notre Chevalier.
Il s’en va combattre toutes les fausses pensées.
Partout où il s’en va, la félicité l’accompagne.
Ne dis rien. Laisse-le s’en aller où il veut.
Parfois, pareil au soleil, il devient un trésor pour la terre.
Parfois, comme la prière du Prophète, il monte vers le ciel.
Parfois, il déverse le lait de la générosité par le sein du nuage.
Parfois, il se promène dans la roseraie de l’âme, tel la brise matinale.
Suis les traces du coeur, afin de découvrir ce qui est caché :
La verdure et la rose poussent, le fleuve de la fidélité coule ».
Celui qui octroie au monde la forme est pur et sans forme.
Celui qui créé toutes les apparences est lui-même sans apparence.
Il est la perfection des perfections, bien qu’il semble commettre des fautes ;
Il est la fidélité des fidélités, bien qu’il exerce une tyrannie.
Le coeur est comme une ouverture, la maison est illuminée par lui.
Le corps va vers l’anéantissement, le coeur va vers la pérennité.
Le coeur a causé des troubles, il a versé le sang des rois.
Il s’est mêlé à tout, bien qu’il soit séparé.
Celui qui a créé la magie divine, apparente dans le coeur de chacun,
Il a dépouillé les Gémeaux, il s’insinue comme Sohâ,
O mon coeur, c’est une sottise que de prendre garde à sa bourse :
La fortune s’est envolée, et la vie s’en va suivre le larron.
J’ai dit : »Tu es un magicien ». Il rit légèrement, et dit :
« Comment la magie opèrerait-elle en présence de la mémoration de Dieu » ?
Je dis, : « C’est vrai. Mais ta magie est le mystère de Dieu.
Ton heureuse magie accompagne l’ordre du destin ».
L’amant a toujours des aventures de coeur et d’âme :
Il est dépouillé de tout. Voici qu’il marche devant toi.

Podcast et intermède musical: Suis les traces du coeur

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