Le retour au centre

Le retour au centre nous permet de méditer ce précieux enseignement de Mawlânâ en le laissant se poser, s’imprimer et prendre forme tout au fond de l’être!

L’homme accomplit des choses que les cieux, la terre et les montagnes ne peuvent réaliser. Quand il les accomplit, l’ignorance et la perversité lui sont épargnées.
Dieu a dit: « Je vous ai achetés, vous, vos personnes, vos biens et votre temps. Si vous Me les consacrez et me les donnez, le prix en sera le Paradis éternel. Tel est votre prix à Mes yeux » (Le Livre du Dedans)
L’ascension sur l’échelle de l’Être, mue par l’Amour divin, fait réintégrer dans l’Unité les parties du tout dispersées dans la multiplicité. Les échelons à gravir sont autant de passages permettant d’échapper à ce qui est périssable. Or, toute chose est éphémère, sauf le Visage de Dieu, dit le Coran: « Cette face est toujours présente, actuelle, continue et éternelle. »
C’est le retour au centre qui fait retrouver à l’âme les cieux qui sont en elle. « Ce toi qui à la fin est conscient d’échapper à ce monde de l’illusion; ton dernier toi (irréel) revenu à ton premier toi réel. » (Mathnawî VI, 3774) Autrement dit, lorsque tu te seras dépouillé de l’attachement de toi (tes désirs, tes illusions, tes attentes etc…) tu atteindras à nouveau le Réel, Dieu, le Véritable (en) toi.
Dans le Mathnawî I, 2035 Rûmî commente les célèbres vers de Sana’î: « C’est dans le royaume de l’âme que se trouvent les cieux qui gouvernent les cieux de ce monde » en ces mots:
« Dans la voie de l’Esprit il existe des plaines et des hauteurs, des montagnes élevées et des mers. »  Le Monde invisible a d’autres nuages et une autre eau que les nôtres, il possède un autre ciel et un autre soleil.
Notre monde d’ici-bas est régit par le Monde invisible, le Monde Spirituel. Il n’y a rien qui se trouve ici qui ne provienne et ne se trouve également dans l’autre Monde! Et cet autre Monde est présent là tout au fond du coeur. Au centre du centre du coeur de l’âme! Il ne sert à rien de chercher à l’extérieur les trésors cachés, la connaissance, la compréhension du Mystère divin!
Il ne suffit pas de regarder la mer et de dire: « Au fond se trouve une perle ». Si tu veux trouver une perle, il faut un plongeur qui plonge et qui a de la chance!

L’intermède musical est tiré de l’album : Psaumes de Yunus Emré  Podcast: Le retour au centre

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Le paon

Enseignement tiré du Mathnawî Livre V
La nature du canard ayant déjà été abordée nous en arrivons à celle du paon. (cf. les quatre oiseaux immatériels) qui symbolise l’arrogance.

Avec ses deux couleurs, le paon (l’arrogance) est tel un hypocrite, qui se déploie par amour de la renommée et de la gloire. Son désir est de s’emparer des gens. Il est ignorant du bien et du mal, ignorant du résultat et ignorant de l’utilité de cette saisie.
Il attrape sa proie sans le savoir, tel un piège. Quel tort ou quel profit advient au piège du fait qu’il attrape sa proie?
Ô mon frère, tu as réjoui tes amis avec deux cents marques d’affection et ensuite tu les as abandonnés.
Ton occupation depuis que tu es né est de capturer des gens, de séduire et de conquérir des coeurs à la seule satisfaction de tes désirs! De ton arrogance, de ton égotisme quel profit retires-tu en fin de compte? Aucun! Tu ne captures rien ni personne si ce n’est toi-même avec ton propre piège, simplement parce que tu es prisonnier et captif… de tes désirs!
La seule chose digne de recherche est l’Amour (Dieu); mais comment serait-Il contenu dans le piège de quiconque? Si par bonheur tu devenais Sa proie, tu pourrais rejeter ton piège et tu L’entendrais dire à ton oreille: « Etre une proie vaut mieux que d’être un chasseur. Fais de toi Mon adorateur aveugle et réjouis-toi de l’être. Reste à Ma porte et sois sans demeure afin de goûter la saveur de la Vie et de contempler la souveraineté cachée dans la servitude. »
Renonce à tes désirs, soumets-toi à Son Amour et tu trouveras le véritable sens de ta nature! Meurs avant de mourir et deviens qui tu es! Amour!

L’intermède musical est tiré de l’album : Psaumes de Yunus Emré  Podcast: Le paon

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Les quatre oiseaux immatériels

Enseignement tiré du Mathnâwî livre V

Les quatre oiseaux qui barrent la voie sont en réalité quatre caractéristiques corporelles; les sacrifier permet à l’âme de s’élever.
Les quatre oiseaux immatériels qui barrent la Voie ont élu domicile dans le coeur des hommes. Il s’agit: du canard, du corbeau, du paon et du coq.
Ce sont des images de quatre mauvaises dispositions dans les âmes.
Le canard représente la cupidité, le coq la luxure, l’arrogance est semblable au paon et  le désir au corbeau.
L’objet du désir du corbeau est l’immortalité ou la longue vie.
Le canard est la cupidité, son bec est toujours sur le sol cherchant ce qui est enfoui dans ce qui est humide ou sec. Son gosier n’est jamais en repos pour un instant. Il n’écoute rien des ordres divins sauf celui de « mangez ».
C’est comme un pillard emportant à la hâte tout ce qu’il trouve, bon ou mauvais, entassant l’humide sur le sec de peur qu’un autre ennemi n’arrive et le prenne avant lui! Il n’a pas confiance en son Seigneur.
Le croyant ayant confiance en cette Vie divine se comporte tout différemment; il ne craint pas de manquer sa chance, ni d’être privé de son profit. Il a constaté la justice du roi, en conséquence il ne se hâte pas et reste calme. Il possède beaucoup de réflexion, de patience et de longanimité; il est content, désintéressé et son coeur est pur!
Pouvoir « couper le cou » de ces quatre oiseaux reviendrait à purifier son caractère, à polir son coeur des scories jusqu’à le rendre lisse comme un miroir. Ca reviendrait à mourir à l’égo, à leurs tentations et provocations à l’égarement; et « s’approprier leurs pattes », signifie utiliser la force sous-jacente pour rejoindre la Vie divine. Pour marcher sur la Voie de Dieu, s’élever et ainsi s’approcher du but.

L’intermède musical est tiré de l’album : Sufi Music of turkey de Kudsi Erguner  Podcast: Les quatre oiseaux

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La racine

Nous avons ici l’histoire d’un amoureux qui raconte à sa bien-aimée tout ce qu’il a fait pour elle et lui demande si elle connaît, elle, d’autre service que ce qu’il a fait.
« Instruis-moi, lui dit-il, car je me soumets à tout ce que tu peux m’ordonner »
C’est en fait le dialogue entre le corps et l’âme, entre le coeur et l’esprit, la nécessité de la transmutation en pur amour pour atteindre la Réalité suprême!

Un amoureux, en présence de sa bien-aimée, rappelait ses services et ses travaux, Disant: « Pour toi, j’ai fait telle et telle chose, dans cette guerre j’ai souffert des flèches et des lances.
« La richesse a disparu, et la force a disparu, et la réputation a disparu: à cause de mon amour pour toi, bien des malheurs me sont arrivés.

« Nulle aube ne m’a trouvé endormi ou riant: nul soir ne m’a trouvé dans une demeure tranquille. »
Ce qu’il avait goûté d’amertumes et de lie, il le lui racontait en détail, point par point;
Non pas en guise de revendication; il faisait seulement montre de cent témoignages de la réalité de son amour. […]
L’amoureux à cause de cette ancienne peine, prononçait cent paroles de plainte, en disant: « Je n’ai pas dit un seul mot. »
Il y avait en lui un feu: il ne savait pas ce que c’était, mais son ardeur le faisait pleurer comme une bougie.
La bien-aimée lui dit: « Tu as fait tout cela, cependant ouvre tes oreilles toutes grandes et écoute bien;
« Car tu n’as pas accompli ce qui est la racine de la racine de l’amour et de la fidélité: ce que tu as fait, ce ne sont que les branches ».

L’amoureux demanda : « Dis-moi, quelle est cette racine? » Elle répondit: « Cette racine c’est de mourir et de s’anéantir.
« Tu as fait tout le reste, mais tu n’es pas mort, tu es vivant. Donc, tu es un ami prêt à se sacrifier! »

Aussitôt, il s’étendit de tout son long et rendit l’âme: comme la rose il donnait sa vie, en riant et en se réjouissant. (Mathnawî V,1242)

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La joie est cachée sous le chagrin

Cache-t-on un trésor d’or en un endroit connu? non! Le Mathnawî livre III,1134 nous dit:  » Comment déposerait-on un trésor dans un endroit connu? c’est pour cela qu’il est dit: « La joie est cachée sous le chagrin ». Si tu désires trouver la joie, d’abord il te faudra libérer le chagrin! « L’amour de Dieu est un feu qui consume les difficultés: la lumière du jour chasse tous les fantômes. Cherche la réponse en ce même lieu d’où t’est venue la question. ». (Mathnawî III,1137)
Lorsqu’une question te taraude l’esprit, c’est que la réponse est déjà en toi, cachée, bien enfouie sous la question. C’est généralement pour des questions cruciales ou que nous considérons comme telles, que nous peinons à entendre la réponse tout au fond de nos coeurs. Nous entendons en principe beaucoup plus clairement pour les autres, c’est pour cette raison en partie, que nous avons tendance à nous tourner vers l’extérieur pour trouver réponse qui nous satisferait! La véritable réponse toutefois n’est nulle part ailleurs (qu’à l’intérieur!) Lorsque nous sommes prêts à entendre la vraie réponse, alors la joie se révèle.
Quand un jour Majnun, ce fou de Dieu, vint frapper à la porte de sa bien-aimée Leyla, elle lui demanda de derrière sa porte close:
– « Qui es-tu? »
– « C’est moi » répondit-il
– « vas-t’en » lui dit-elle, il n’y a pas de place ici pour deux « moi »
Il partit triste et chagrin dans le désert et y resta une année à méditer sur cette réponse, puis il revint frapper à la porte de Leyla. A sa demande :
– « Qui es-tu? » il répondit:
–  « c’est toi »
– « Entre » lui dit-elle
Sache que le monde de l’Unification est au-delà des sens.

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